L’intégration de l’ESG dans les réglementations financières et assurantielles

12/06/2019

Synthèse

L’Investissement Responsable est un terme générique qui désigne les différentes approches consistant à intégrer les enjeux Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance dans la gestion financière. Lorsqu’il est pratiqué de façon structurée et systématique pour sélectionner les titres d’un fonds identifié et vise à financer les acteurs d’une économie inclusive et bas carbone, on parle alors de fonds d’Investissement Socialement Responsable, ou ISR.
Ainsi, les indicateurs déterminant les décisions d’investissement ne sont plus uniquement financiers, mais combinent performance financière et extra-financières des émetteurs (entreprises, collectivités, Etats…).

https://www.novethic.fr/finance-durable/comprendre-linvestissement-responsable/definitions-et-objectifs.html

L’investissement responsable est devenu un enjeu majeur, que ce soit pour les investisseurs, ou des régulateurs.
Nous avons vu l’arrivée de l’article 173 de la loi TEE en France – que nous ne reprendrons pas ici – et nous devrions assister dans les années à venir à une présence de plus en plus forte de l’ESG dans les réglementations : dans MIFID2 et Solvency 2 notamment.

 

Les prémices

En 2018, la Commission Européenne a finalisé une première proposition pour établir un cadre à la gestion « durable ». Ce cadre prévoit la définition des critères dans les domaines suivants : lutte contre le changement climatique, protection de l’eau et des ressources marines, économie circulaire, limitation des déchets et recyclage, contrôle et prévention de la pollution et enfin protection des écosystèmes.
En parallèle la Commission a lancé la définition d’indices « bas-carbone », qui pourront se substituer aux indices de références existants.

Pour en savoir plus :
https://www.novethic.fr/actualite/finance-durable/isr-rse/finance-durable-les-nouvelles-regles-du-jeu-en-europe-145857.html
https://ec.europa.eu/info/publications/180524-proposal-sustainable-finance_en

 

La suite…

La Commission Européenne a chargé l’EIOPA – régulateur des assurances – et l’ESMA – régulateur des sociétés de gestion, de proposer les évolutions nécessaires à l’intégration de l’ESG dans les réglementations suivantes :
– UCITS & AIFM – réglementations des fonds d’investissements
– Solvency 2 – cadre prudentiel des assureurs
– MIFID 2 & IDD – réglementations de la distribution des produits financiers

 

Premier impact concret – Solvency 2 & IDD – impact pour les assureurs

L’EIOPA, le régulateur européen des assurances, a lancé le 26 novembre 2018 une consultation sur l’intégration de l’ESG.
Cette consultation s’est clôturée le 30 janvier 2019.

Points clés de la consultation – Solvency 2 :

Intégration des risques de durabilité dans le pilotage des risques
Intégration des risques de durabilité dans le principe de la personne prudente (PPP)

L’EIOPA précise que les risques de durabilité, et en particulier les changements climatiques, impacteront l’activité des compagnies d’assurance de manière certaine. A ce titre elle considère que les assureurs, devant agir selon le PPP, doivent intégrer ces risques dans le pilotage de leur activité, tous secteurs confondus.

Intégration des risques de durabilité dans la fonction actuarielle
Intégration des risques de durabilité dans le pilier 2 (ORSA)

Points clés de la consultation – IDD (Insurance Distribution Directive) :

Intégration des risques de durabilité dans la gestion des conflits d’intérêts
Prise en compte de la demande des clients pour l’intégration de l’ESG – et proposition uniquement de produits répondant à ces critères si le client exprime cette volonté

Avec, sur ce dernier aspect, la question clé de la consultation : quels standards de marché ou labels sont à privilégier pour caractériser les produits ESG.

Pour en savoir plus :
https://eiopa.europa.eu/Pages/News/EIOPA-consults-on-the-integration-of-sustainability-risks-and-factors-.aspx

 

Deuxième round, UCITS, AIFM et MIFID2

Un principe général : définir les principes généraux uniquement à ce stade, et ne pas être (trop) intrusif dans les organisations.

Points clés UCITS et AIFMD (modifications symétriques) :

  • Intégration de l’ESG dans les process de décisions, et dans l’organisation
  • Mais pas nécessairement de ressources ou d’expertises dédiées – vision globale au niveau de l’entreprise
  • Responsabilité du senior management
  • Obligation de suivre l’ESG

Source : ESMA34-45-688 – 30/04/2019

Points clés de MIFID 2 :

  • Obligation de prendre en compte les préférences ESG des clients
  • Obligation de s’assurer que les produits proposés sont cohérents avec ces préférences
  • Et donc obligation d’inclure l’ESG dans la politique de gestion des risques

Source : ESMA35-43-1737 – 30/04/2019

 

En conclusion

Dorénavant, il ne faudra plus parler de critères ESG, mais bel et bien de risques ESG – décomposés en facteurs de risque.
Cette différence sémantique peut paraître anodine, mais reflète bel et bien un changement radical d’approche. Investir socialement responsable n’est plus une option, ne pas le faire est prendre un risque.
L’argument de l’EIOPA (les assureurs sont en risque sur l’ESG, et en particulier sur les changements climatiques) paraît en effet indiscutable. Il suffit de voir l’augmentation récente – et attendue – du nombre de catastrophes naturelles recensées, et l’impact sur les assureurs ou sur tous les acheteurs de cat-bonds.
Reste à savoir quels seront les critères définitifs, mais la tendance est là, a priori pour longtemps.

 

[Nicolas Fournier]